La foi

La foi, sans trop savoir pourquoi,

Touche des êtres et d'autres pas.

Parfois un pêcheur près de l'onde

Intègre le céleste monde.

Elle assiège les âmes à n'importe quelle heure,

Crée des cris de douleur, provoque quelques pleurs.

Une soeur lit au bord du ciel,

Plonge ses yeux dans le bassin,

Y voit le visage d'un saint,

Auréolé d'un arc-en-ciel.

A.M

Le vieux châtaignier bizarre

Moi, l'ancien châtaignier, comme un géant debout,

Avec mes bras autour et mon tronc un peu fou !

Ou bien objet vivant, ou bien sujet de bois,

Ni objet ni sujet, l'un et l'autre à la fois,

Je grignote le ciel quand mes pieds s'ancrent en terre ;

Entre les deux ma sève, son histoire, ses mystères.

Comme un grand roi se plait au sein de ses sujets,

Je passe les saisons dans ce havre de paix.

*

Ma chanson sous la pluie, égaie les randonneurs

Qui s'étonnent, à l'automne, de mes chaudes couleurs.

Mes rameaux sentent encore un peu la chlorophylle;

Mes feuilles jaunes et rouges ont des odeurs subtiles.

J'essaime ici ou là et m'étends d'avantage,

Vers de plus jeunes pousses au flanc des pâturages.

Je lève encor' la tête, reste large et mastoc,

Regarde, vu d'en haut, les gens de mon époque.

**

Alain

Moi la cascade de Cubervies !

Sur les rochers, avec fracas,

La cascade mène un débat ;

Elle veut larguer Asmodée

Qui refuse la pureté :

"Moi la chute qui tombe, m'éclate, et tic et tac,
M'émousse avec mes pics avant de fondre en vrac !

Cire jaune qui pend jusqu'au pied des hauts cierges,

Mon collier perd ses perles, met du fard sur les berges."

Alain Montoux